Le rituel du carnaval en Occitanie

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Le rituel du carnaval en Occitanie

Le rituel du carnaval en Occitanie

Le jour du monde à l’envers

« La forêt de symboles où le carnaval nous conduit grouille de bourgeonnements bizarres, de naissances insolites, de créations hors nature. La fête pense, mime et provoque une régénération du temps, du monde naturel, de la société »
Daniel Fabre 

« Carnaval, cette fête que le peuple se donne à lui-même »
Goethe

Chaque année entre février et mars, la période où la sève monte, la nature prend vie et où les femmes et les hommes retrouvent une énergie nouvelle du printemps venant, les villes d’Occitanie vivent aux rythmes du carnaval ! Partons ensemble à la découverte de cette fête millénaire aux racines multiples. 

Historique du Carnaval 

Les origines païennes du Carnaval 

Depuis l’Antiquité, on retrouve en Occitanie et dans la plupart des pays Européens, des traditions festives impliquant l’inversion des rôles dans la société, des défilés et de la musique. 

Le point commun à toutes ces célébrations : la fin de l’hiver et l’arrivée du printemps. 

Au 2ème siècle avant J-C, Babylon célébrait la déesse de la fécondité Anaïtis et le début du printemps. Durant 5 jours et 5 nuits, tous les rôles étaient inversés : les esclaves prenaient la place des maîtres, les femmes celles des hommes, et un condamné à mort était même nommé roi avant d’être exécuté. 

En Grèce antique, au début du printemps on célébrait à Athènes, Dionysos, Dieu de la fécondité, du vin et de la nature avec des défilés, de la musique et du théâtre. 

Du côté de la Rome Antique, on retrouve les origines du carnaval dans la fête des Saturnales, en l’honneur de Saturne, Dieu de l’agriculture et du temps. Durant 8 jours, au moment du solstice d’hiver on retrouve dans ces fêtes l’inversion des rôles, l’élection de faux roi…

Le carnaval, une fête encadrée par l’Église entre le 11ème et le 13ème 

Au Moyen-âge, l’Église catholique s’approprie les festivités d’origine païenne. Elle fait coïncider le carnaval avec la liturgie chrétienne.  Le carnaval est alors fixé entre l’épiphanie et le Mardi gras, qui a toujours lieu 41 jours avant Pâques. 

Les fêtes costumées synonymes de liberté sont encadrées par l’Église qui les considère comme primordiales pour éviter les révoltes du peuple. 

Carnaval, de l’italien « carne levare », enlever la viande, devient alors la période avant carême où tous les excès de nourriture sont permis. Il faut vider les réserves de nourritures grasses.

Le pouvoir dénonciateur du Carnaval

« Il suffit d’un rien pour que ce retournement généralisé prenne – en période de lutte sociale – une signification politique ».

« La révolte retrouve la sécurité des rites, s’appuie sur la folie systématique de la Fête, pour amortir le vacillement perpétuel de l’Histoire ». 

 Daniel Fabre

A chaque moment historique, à chaque siècle, correspondent ses luttes. Si le XIXème siècle voit s’achever les grandes révoltes « anti fiscales » ou « anti féodales », et fait naître des luttes organisées autour du travail et de la prise de pouvoir, chacune d’elles puise son thème dans le carnaval ou « glisse en lui ses propres symboles ». 

Sous les monarchies et les empires, ce sont les cocardes tricolores et les chants séditieux qui occupent la place dans les carnavals. 

Au début du XXème siècle, c’est à certains endroits, la religion qui est mimée. Les Ermites d’Espéraza promènent le jour de carnaval une immense croix de bois sur laquelle pendent des chapelets, des liasses de boudins et des plis de saucisse qui représentent tous les grands sacrifiés du printemps : le cochon, le Christ et le Roi-Carnaval. 

Dans les années 70, ce sont les revendications féministes qui s’invitent dans les carnavals occitans. 

A Limoux en 1972 et pour la première fois dans l’histoire du carnaval, des femmes se révoltent parce qu’elles n’ont pas le droit de jouer dans les fanfares. 

Le groupe des « révolutionnaires » mènent alors la musique en brandissant des pancartes aux slogans revendicatifs :



« Omes al trabalh, femnas al   carnaval

Daissa me santar, vai-t-en bressejar

Davant Carnaval sarà l’égalitat

Un jorn per an, per un còp

Menarèm la musica »

« Hommes au travail, femmes au carnaval, 

Laisse-moi sauter, va-t’en bercer

Devant Carnaval ce sera l’égalité

Un jour par an, pour une fois

Nous mènerons la musique » 



Le carnaval est mis sens dessus dessous, c’est le monde à l’envers. 

Les femmes prennent leur place dans les carnavals en jouant habilement de la logique de l’inversion carnavalesque. 


Le carnaval face aux pouvoirs

La répression politique a de tout temps visée le carnaval, mais le pouvoir ne saurait l’exploiter. 

En 1910 à Cournonterral au cours des Palhassas, le préfet envoie une escouade de gendarmes, mais le Conseil Municipal vêtu de blanc s’offre à l’arrestation. 

En 1973 à Brive, des jeunes avaient défilé dans trois voitures couvertes de slogans antimilitaristes, ils sont jugés et condamnés. 

En 1977, le Maire de Nice interdit le « port des masques représentant le président de la République ». 

A Perpignan, la même année, trois masques sont arrêtés pour avoir en queue de corso sorti quelques pancartes hostiles aux notables régnants. 

La répression est donc toujours ce qu’elle était : Carnaval a un pouvoir dénonciateur mais échappe au jeu institutionnel grâce à sa seule arme : la dérision. 

« La lutte commence dans le rire, affirme ensuite sa force, tranquille ou violente, et s’achève souvent dans le feu » 

Daniel Fabre

Le carnaval occitan : entre hommage à la nature, inversion parodique et dénonciation de la politique 

« La vitalité du carnaval se fonde sur cette capacité d’organisation populaire.

Du groupe naît l’invention, celle qui constamment redécouvre les figures du rite et reçoit l’adhésion passionnée de tout le peuple d’une cité »

Daniel Fabre




Fête universelle de l’inversion des rôles, le carnaval est le moment de l’année où l’ordre social et les règles établies disparaissent pour laisser place au chaos et au désordre. 

Le peuple reprend le pouvoir pour un temps, pour une fête qui devient un acte de contre-histoire, de revendications et de pouvoir dénonciateur de la politique, avec pour objectif de faire voler en éclats les inhibitions quotidiennes. 

A carnaval tot i se val ! 

Au carnaval tout s’y vaut, tout est admis, tout est permis. 

C’est le temps du monde à l’envers, inversion, travestissement pour instaurer un monde régi par des règles propres aux Hommes et aux Femmes, séparées du pouvoir en place. 

Plus encore, le Carnaval en occitan se fa amassa, ensemble, en famille. Per carnaval maridan lo cabessal, ce qui signifie qu’à Carnaval on marie même le torchon. 

Mais les rituels et les règles sont bien présents dans ces festivités. 

En plus du déguisement, du masque, qui représentent une permutation de l’envers et de l’endroit, dans un temps limité, des danses et des musiques, il y a un personnage clé dans le Carnaval occitan : Caramentran. C’est le monsieur Carnaval. 

Pendant le carnaval on lui fait son procès, on le traite de tout, on l’accuse de tous les maux, on se décharge sur lui de tous nos problèmes : mauvaises récoltes, gel, sécheresse, séparation, fermeture de classe, mort…puis il est brûlé. 

Sa crémation symbolise la fin d’un cycle et le début d’un autre. Comme le printemps qui succède à l’hiver. C’est aussi une manière de nettoyer son esprit, de s’alléger ou de changer la vision des choses. Pendant qu’il brûle, on lui dit au revoir : 



Adieu paure, adieu paure,
Adieu paure Carnaval
Tu te'n vas e ieu demòri
Adieu paure Carnaval

Tu te'n vas e ieu demòri
Per manjar la sopa a l'alh
Per manjar la sopa a l'òli
Per manjar la sopa a l'alh
Adieu paure, adiu paure,
Adieu paure Carnaval

Adieu, pauvre, adieu pauvre,
Adieu pauvre Carnaval
Tu t'en vas et moi je reste
Adieu pauvre Carnaval

Tu t'en vas, et, moi, je reste
Pour manger la soupe à l'ail
Pour manger la soupe à l'huile
Pour manger la soupe à l'ail
Adieu pauvre, adieu pauvre,
Adieu pauvre Carnaval



Les personnages emblématiques des carnavals occitans 

Et quelques exemples de carnaval 

Dans le sud de la France, la présence du carnaval est forte, l’imaginaire populaire des pays d’oc a fait naître une multitude de personnages emblématiques que l’on peut croiser au détour des rues, accompagnés par la musique des fifres/galoubets/hautbois et tambours. 

Entre les buffatiers qui « soufflent au cul de la vieille », les ours qui coursent les jeunes filles en les marquant de noir une fois attrapées, entre le petaçon avec son balai à la vessie de porc, et les terrifiant palhassas de Cournonterral, le carnaval fait vivre des personnages surprenants, terrifiants et grotesques. 



Les animaux totémiques de l’Hérault 

Dans l’Hérault, la tradition des animaux totémiques remonte au XVIe siècle. Une cinquantaine d’animaux totémiques, emblèmes des villes, existent encore aujourd’hui. 

Ils sont fabriqués avec une structure de bois et recouverts de toile ou de carton, et bougent grâce à de nombreux porteurs. 

Le chameau de Béziers Le bœuf de Mèze  

Le Poulin de Pézenas fait son apparition le mardi du Carnaval. 

En 2005 il a été classé au Patrimoine immatériel de l’humanité par l’UNESCO.

Tout le monde défile au son des fifres, et de tambourins, suivis d'une joyeuse procession, à chaque fois qu'une fête approche : au Carnaval, au printemps ou pendant les vacances.

Certains animaux totémiques illustrent un épisode de l'Antiquité, d'autres s'inspirent d'un personnage du Moyen Âge ou de légendes sur l'histoire de la commune.

Los  Palhassas de Cournonterral 

Tous les ans à Cournonterral, le mercredi des cendres, se déroule le carnaval des Palhassas, selon une tradition antique qui remonte au 14ème siècle et qui respecte des règles bien précises. 

Les jeunes du village s’habillent de blanc et doivent échapper à des créatures terrifiantes, les Pailhassas, vêtues d’un sac de Patate rempli de paille.  

Ils portent un grand chapeau et cachent leur visage derrière un manteau de laine noire et doivent se frotter contre des personnes vêtues de blanc.

La fête se déroule toujours de la même manière.

A 10 heures du matin, les paillasses sont préparées.

Tout le monde peut assister à cette préparation. Les anciens du village versent de la lie de vin dans les rues  du village, les commerçants protègent leurs boutiques avec des plastiques pour qu'elles ne se salissent pas.

A 14 heures, il y a un défilé très traditionnel à travers le village avec une musique spéciale.

A 15 heures, après un roulement de tambours, commence la poursuite des blancs par les Paillasses.

Les visiteurs sont considérés comme des blancs s’ils restent après 15h. 

Les Paillasses imbibent un chiffon dans les comportes de lie de vin et courent après les blancs. Lorsqu’une cible est attrapée, elle est baignée dans les comportes.

A 18 heures précises, la course se termine en dansant. 

Le Carnaval de Montpellier 2024 

La festa del Monde al revèrs 

Samedi 23 mars 2024

À 15h30 départ de la Place royale du Peyrou à Montpellier

Suivi du grand cortège carnavalesque : 15h30 Départ du Peyrou – Rue Foch – Place des Martyrs de la Résistance – Rue Saint Guilhem – Rue Sainte Anne, et retour au Peyrou pour le Jugement de Caramentran par des élèves acteurs.

« Sèm lo vint et tres de març. Enfin, nous sortons de l’hiver, du froid et de la grisaille! Place aux fleurs et au Soleil ! Aidons l’allégresse à se répandre partout, car l’heure est à la fête !

Mais le Carnaval est bien plus que la joie et les déguisements ! Le temps de changement qu’est l’équinoxe de printemps révèle depuis toujours les dissensions entre les humains.

De joyeuses divergences se feront jour…

Nous pourrons compter sur les carnavaliers pour défendre le bien vivre et le bien manger, en harmonie avec la nature. On pourra s’attendre à voir Carême, qui représente les contraintes et les tristesses de la vie, les attirer vers un tout autre chemin de vie…

Mais le joyeux cortège ne va pas se laisser faire ! Avec l’aide des Totems des écoles, et des musiciens, les carnavaliers vont restaurer l’harmonie entre l’humanité et la Nature !

Alors, le peuple dans une mascarada protocolaire, ira négocier auprès du Consul : car comme le veut la tradition, le peuple de carnaval doit obtenir la clé de la Ville ! »

CARNAVAL OCCITAN (Montpellier) | Montpellier Tourisme

Calandreta Dau Clapas
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